LECTURE BIBLIQUE :
Les lectures proposées par la fédération protestante
de france prévoyaient de lire les 2 premiers versets du chapitre
12,mais il m'a semblé intéressant de lire l'ensemble du chapitre 12
de cette lettre ce sera le seul texte biblique retenu pour ce jour :
(TOB)
Je vous exhorte donc, frères, au nom de la miséricorde
de Dieu, à vous offrir vous-mêmes en sacrifice vivant, saint et
agréable à Dieu : ce sera là votre culte spirituel. Ne vous
conformez pas au monde présent, mais soyez transformés par le
renouvellement de votre intelligence, pour discerner quelle est la
volonté de Dieu : ce qui est bien, ce qui lui est agréable, ce
qui est parfait.
Au nom de la grâce qui m’a été donnée, je dis à
chacun d’entre vous : n’ayez pas de prétentions au-delà de
ce qui est raisonnable, soyez assez raisonnables pour n’être pas
prétentieux, chacun selon la mesure de foi que Dieu lui a donnée en
partage. En effet, comme nous avons plusieurs membres en un seul
corps et que ces membres n’ont pas tous la même fonction, ainsi, à
plusieurs, nous sommes un seul corps en Christ, étant tous membres
les uns des autres, chacun pour sa part. Et nous avons des dons qui
diffèrent selon la grâce qui nous a été accordée. Est-ce le don
de prophétie ? Qu’on l’exerce en accord avec la foi. L’un
a-t-il le don du service ? Qu’il serve. L’autre celui
d’enseigner ? Qu’il enseigne. Tel autre celui d’exhorter ?
Qu’il exhorte. Que celui qui donne le fasse sans calcul, celui qui
préside, avec zèle, celui qui exerce la miséricorde, avec joie.
Que l’amour soit sincère. Fuyez le mal avec horreur, attachez-vous
au bien. Que l’amour fraternel vous lie d’une mutuelle
affection ; rivalisez d’estime réciproque. D’un zèle sans
nonchalance, d’un esprit fervent, servez le Seigneur. Soyez joyeux
dans l’espérance, patients dans la détresse, persévérants dans
la prière. Soyez solidaires des saints dans le besoin, exercez
l’hospitalité avec empressement. Bénissez ceux qui vous
persécutent ; bénissez et ne maudissez pas. Réjouissez-vous
avec ceux qui sont dans la joie, pleurez avec ceux qui pleurent.
Soyez bien d’accord entre vous : n’ayez pas le goût des
grandeurs, mais laissez-vous attirer par ce qui est humble. Ne
vous prenez pas pour des sages. Ne rendez à personne le mal pour
le mal ; ayez à cœur de faire le bien devant tous les
hommes. S’il est possible, pour autant que cela dépend de
vous, vivez en paix avec tous les hommes. Ne vous vengez pas
vous-mêmes, mes bien-aimés, mais laissez agir la colère de Dieu,
car il est écrit : A moi la vengeance, c’est moi qui
rétribuerai, dit le Seigneur. Mais si ton ennemi a faim,
donne-lui à manger, s’il a soif, donne-lui à boire, car, ce
faisant, tu amasseras des charbons ardents sur sa tête. Ne te
laisse pas vaincre par le mal, mais sois vainqueur du mal par le
bien.
PRÉDICATION
« Faire des sacrifices », cette
expression en temps de crise s'entend très souvent. Il faut « faire
des sacrifices », cela revient à dire qu'il faut se priver,
faire attention, se serrer la ceinture. Force est de constater que le
sacrifice, s''il est un mot que l'on entend souvent ou une notion à
la mode, ce n'est pas quelque chose de très positif.
Car dans le sacrifice il y a une notion de mort, ou de
mise à mort - loin d'être positive – à quelques centaines de
mètres des arènes et à quelques jours de la feria tout le
monde comprendra cette notion sacrificielle de mise à mort.
Même dépassant le cadre des traditions locales, de
manière plus dramatique dans nos actualités il y a aussi,
aujourd'hui, dans le sacrifice la notion de martyr qui renvoie à
toute une violence de la religion dans les discours fondamentalistes
et intégristes. Ou toute une violence faite contre la religion et on
pensera alors à l'église persécutée en Iraq et dans divers et
nombreux lieux du monde.
Bref ; pas besoin de long discours pour expliquer
qu'un sacrifice c'est violent voire morbide et, pour le moins, assez
détestable pour quiconque à quelques valeurs éclairées et
humanistes.
Si je vous parle de sacrifice, c'est que dans le texte
de l'épître aux romains que j'ai lu l'apôtre Paul parle de
sacrifice, il ne parle que de ça, même. C'est le premier verset de
ce chapitre 12 : « Je vous exhorte à vous offrir en
sacrifice vivant, saint et agréable à Dieu » ; et tout
ce chapitre 12 n'est qu'un développement de cette première parole,
c'est pour ça que j'ai tenu à lire ce chapitre en entier.
Paul parle de sacrifice, oui, mais il en parle de
manière tout à fait contraire à notre compréhension. Ainsi, si
pour nous le sacrifice est morbide, renvoyant à une mise à mort,
pour Paul, il s'agit d'un sacrifice vivant. Si pour nous le sacrifice
c'est la part la plus violente d'une religion, pour l'apôtre le
sacrifice est saint. Et si en dehors même de toute notion
religieuse, le sacrifice est pour le moins une privation assez
désagréable, pour l'Apôtre le sacrifice est agréable à Dieu.
Paul parlant d'un sacrifice vivant, saint et agréable
est très loin de notre compréhension contemporaine du sacrifice.
Très loin des mises à mort au cœur des arènes, très loin des
martyrs intégristes. Pour le dire avec un jeu de mot, si pour nous,
dans une compréhension courante et contemporaine, le sacrifice est
une mise à mort, pour Paul, le sacrifice est une mise en amour ;
une mise en amour pour le renouvellement de notre intelligence.
Pour Paul, « le sacrifice n'est pas mise à mort,
mais mise en amour », c'est ce que développe tout le chapitre
12 en multipliant les recommandations. Appelant à l'unité de
l'église, à tenir la communion les uns avec les autres, Paul met au
cœur de ses recommandations une parole d'amour :
« Que l’amour soit sincère. Fuyez le mal avec
horreur, attachez-vous au bien. Que l’amour fraternel vous lie
d’une mutuelle affection ; rivalisez d’estime réciproque.
D’un zèle sans nonchalance, d’un esprit fervent, servez le
Seigneur. Soyez joyeux dans l’espérance, patients dans la
détresse, persévérants dans la prière. Soyez solidaires des
saints dans le besoin, exercez l’hospitalité avec empressement.
Bénissez ceux qui vous persécutent ; bénissez et ne maudissez
pas. »
L'amour fraternel s'enracinant dans l'amour du Seigneur
ouvrant nos vies comme une bénédiction. Il est là le sacrifice,
devenir source de bénédiction et non pas de malédiction ;
c'est là un renouvellement d'une intelligence qui n'est plus au
service de ma propre vie, mais au service du projet de Dieu, en un
mot : au service de l'amour.
Mise en amour, le sacrifice c'est faire passer l'amour
avant mon intérêt – renouvellement d'une intelligence qui ne se
centre plus sur ma vie, mais sur le Christ : victoire du bien
sur le mal : « Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais
sois vainqueur du mal par le bien ». La seule chose qui est
alors réellement sacrifiée c'est notre égoïsme, et notre
sentiment de posséder nos vies, d'en être les propriétaires,
d'être nos propres créateurs, ce que toute la Bible appelle le
péché.
Ce sacrifice qui n'est pas mise à mort, mais une mise
en amour, peut ouvrir chaque existence à une vie chrétienne
renouvelée par la présence du Christ. Une présence qui est donnée
et garantie par Dieu. Une présence et un amour que rien ne peut
éloigner de nous, avait déjà écrit Paul quelques chapitres plus
tôt dans deux très beaux versets du chapitre 8 de sa lettre :
« Oui j'en ai l'assurance : ni la mort, ni la vie, ni les
anges, ni les dominations, ni le présent, ni l'avenir, ni les
puissances, ni les forces des hauteurs, ni celles des profondeurs, ni
aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l'amour de
Dieu manifesté en Jésus Christ notre Seigneur ».
Le sacrifice n'est pas mise à mort, mais mise en
amour ; de cet amour manifesté par le Seigneur qui vient
enraciner le lien communautaire. Car nous ne sommes pas aimé par
Dieu, dans un chacun pour soi, mais pour être les uns pour les
autres source de bénédiction, d'espérance et de joie. L'amour que
Dieu nous porte fonde une communion dans laquelle chacun peut trouver
sa place, et chacun peut vivre les dons du Père. Il s'agit de vivre
dans l'église une autre intelligence que celle du monde.
Pour bien comprendre, un peu de la même manière, dans
sa première lettre aux Corinthiens, Paul dit aux chrétiens que
leurs corps est devenu le Temple du Saint-Esprit. Le temple, c'est le
lieu du monde que Dieu se réserve pour y habiter, sa propriété.
Vos corps, dit l'apôtre, ne vous appartiennent plus. Ils sont
destinés à glorifier Dieu dans l'amour. Tel est l'accomplissement
de la volonté de Dieu exprimée dans la législation sacrificiel,
voilà le sacrifice saint et agréable à Dieu ».
N'appartenir qu'à Dieu, ensemble, pour être, les uns
avec les autres, témoins de cette gloire de Dieu. Ainsi le pasteur
Antoine Nouis, commentant ce passage écrivait : « Nous
sommes tous sous l'influence de l'intelligence de notre monde et Paul
nous dit : ne vous conformez pas au monde présent, mais soyez
transformés par le renouvellement de votre intelligence, autrement
dit « ayez l'intelligence de quitter la logique de ce monde,
pour entrer dans celle de l'évangile ». La logique de
l'évangile est celle de la grâce et de la justification gratuite
alors que celle de notre monde est la logique de l'ambition sociale,
du profit et du pouvoir » fin de citation.
Ne pas être en église dans la même logique que celle
du monde, voilà le sacrifice pour Paul ; mettre à mort nos
égoïsmes, savoir délaisser les logiques d'ambition, de réussite,
de profit et de pouvoir, pour entrer en communion. Une communion dans
laquelle chacun trouve la place à laquelle Dieu l'appelle.
Dimanche dernier je commençais ma prédication
avec un extrait de l'histoire du petit Poucet ; aujourd'hui la
petite histoire terminera ma prédication : Vous connaissez sans doute le roman de Victor Hugo, « les misérables ». Le héro Jean Valjean vient d'être
libéré du bagne, et il est accueilli un soir par l'évèque de
Digne, Monseigneur Bienvenu, qui lui annonce l'évangile. Valjean
s'en va pendant la nuit en volant quelques pièces d'argenterie ;
mais voilà qu'il est prit par les gendarmes en possession de ces
objets volés.
Les forces de l'ordre le ramènent donc chez l'évêque
avec l'objet du vol. Mais au lieu d'accuser Valjean et de récupérer
son bien, l'évêque dit au voleur :« Ah vous voilà, Je
suis bien aise de vous voir. Eh bien ! je vous avais aussi donné
les chandeliers aussi, qui sont en argent comme le reste et dont vous
pourrez bien avoir 200 francs. Pourquoi ne pas les avoir emporté
avec vos couverts ? Tenez-les donc, ils sont à vous ! ».
Et l'évêque de donner à son détrousseur les chandeliers en plus
de ce qu'il avait emporté.
EN fait, par les paroles de l'évêque, le vol de Jean
Valjean a été transformé en don ; très concrètement le mal
a été vaincu par le bien. D'ailleurs Victor Hugo met dans la bouche
de l'évêque ces dernières paroles, une fois les gendarmes partis :
« Jean Valjean, mon frère, vous n'appartenez plus au mal, mai
au bien. C'est votre âme que je vous achète ; je la retire aux
pensées noires et à l'esprit de perdition, et je la donne à
Dieu ».
Ne pas être en église dans la même logique que celle
du monde, voilà le sacrifice pour l'apôtre Paul - c'est ce
qu'avait compris l'évêque Bienvenue sous la plume de Victor Hugo ;
mettre à mort nos égoïsmes, nos possessions et nos appartenances,
savoir délaisser les logiques de réussite, de profit et de pouvoir,
pour entrer en communion. Une communion dans laquelle chacun trouve
la place à laquelle Dieu l'appelle, une communion dans laquelle Dieu
nous donne plus que ce que nous demandons.
« Je vous exhorte donc, frères, au nom de la
miséricorde de Dieu, à vous offrir vous-mêmes en sacrifice vivant,
saint et agréable à Dieu : ce sera là votre culte
spirituel. »
« Que l’amour soit sincère. Fuyez le mal avec
horreur, attachez-vous au bien. Que l’amour fraternel vous lie
d’une mutuelle affection ; rivalisez d’estime réciproque. »
« Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais sois
vainqueur du mal par le bien. »
Au Christ seul soit la gloire. Amen.
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