En septembre,
je réagissais à un article de Nicole Deheuvels qui affirmait que le
débat synodal sur la bénédiction et notamment quant aux bénédictions des
couples de même sexe remettait en cause le Sola Scriptura. Elle écrivait "Aucun texte biblique ne venant
soutenir positivement le projet de couple homosexuel, discréditer
les textes qui en parlent de façon négative sous le prétexte d'une
contextualisation revient à s'affranchir de la Bible comme
référence. C'est ce pas là qu'une Église née de la Réforme et du
Sola scriptura s’apprêterait à franchir". Je renvoyais alors
cette collègue pasteur et soeur en Christ à l'exemple du ministère
féminin que notre Église a accepté quand bien même : "aucun
texte biblique" ne venait "soutenir positivement le
projet"
Aujourd'hui je publie à nouveau un post sur le sujet, car quelques questions m'ont été posées par rapport à mon article précédent sur la bénédiction - ma réponse à Gilles Boucomont. J'entends donc clarifier ma compréhension du Sola Scriptura sans vouloir l'imposer comme universelle. Pour moi, proclamer l'autorité souveraine des Écritures en matière de foi revient à nous placer dans une obligation de répondre.
Une obligation de répondre : En tant que croyant, la foi nous place continuellement en tension entre ce que nous vivons et ce que nous croyons ; d'autres ont dit ça mieux que moi - c'est la tension entre le "déjà là" et le "pas encore", ou dite autrement c'est la tension entre "l'ordre de la création" et "l'ordre du salut". Cette tension est obligée puisque nous n'avons pas d'autres mondes que le nôtre pour vivre avec Dieu, la foi ne nous projette pas dans un ailleurs qui serait un "avec Dieu" pour ne plus être un "dans ce monde". Du coup, le Sola Scriptura revient à tenir la tension, à relever le défi d'être et "avec Dieu" et "dans ce monde", à ne pas renoncer à la richesse d'entendre et de dire la bonne nouvelle pour aujourd'hui. En tant que "dans ce monde" nous avons obligation à répondre de la Parole que nous entendons de Dieu, et comme étant avec Dieu il nous faut répondre aux questions de sens que peut poser le monde en renvoyant à cette Parole : voilà notre obligation de répondre.
Pour reprendre les catégories classiques (telles que les développe par ex. André Birmelé dans l'horizon de la grâce, cité dans un article précédent) : Oui l’Écriture est suffisante pour nourrir notre foi, oui l’Écriture est son propre interprète et personne d'autre que l’Éternel ne peut nous dicter son sens, oui l’Écriture est la seule norme de tout discours chrétien - mais si l’Écriture est nourriture, interprète et norme ce n'est pas pour nous faire vivre en dehors du monde. Au contraire, la révélation de la bonne nouvelle transmise par les Écriture vient nous permettre de tenir dans ce monde, avec Dieu.
Aujourd'hui le monde nous interroge : j'ai accompagné un couple de personnes de même sexe en m'en tenant au discours de l'église, en refusant de construire une cérémonie et en expliquant notre démarche. Non sans heurts intérieurs pour moi, dans mon ministère pastoral, comme au sein du conseil presbytéral lorsque nous en avons débattu. Il ne s'agissait plus alors de savoir si on était pour ou contre un sujet synodal mais bien de savoir si notre église accompagnait une telle et une telle dans leurs chemins de vies. Lors d'une rencontre avec elles, j'ai assumé ce "non" et je l'assume encore. ça a été ma réponse, car mon Église ne me donnait pas les moyens de répondre autrement. Cette rencontre avec ce couple a été la dernière, et quand il m'arrive de croiser l'une ou l'autre dans le quartier les regards sont fuyants. C'est ma seule expérience, je n'en suis pas fier ; pas plus que la présidente du conseil presbytéral d'alors. Compte tenu des statistiques (10.000 mariages sur 241.000 en 2014 soit 4, 15 %) on peut penser que si je continue à préparer 6 ou 7 bénédictions par ans et en supposant que chaque couple de même sexe, marié civilement, demande à notre Église une bénédiction de son union (hum...) je n'aurai pas d'autres demandes avant 15 ans !
Aujourd'hui le monde nous interroge ; certains préfèrent dire que la question est mal posée, que nous devons encore réfléchir, que le débat a été biaisé, d'aucuns réclament une démarche conciliaire, et j'en passe... autant de manières de na pas répondre. Affirmer l'autorité souveraine des Écritures nous confronte aujourd'hui à une obligation de répondre. Répondre non pas au nom d'une anthropologie, d'une identité, d'une morale, d'une option politique, mais au nom de l’Écriture et de la bonne nouvelle dont elle témoigne...
Aujourd'hui je publie à nouveau un post sur le sujet, car quelques questions m'ont été posées par rapport à mon article précédent sur la bénédiction - ma réponse à Gilles Boucomont. J'entends donc clarifier ma compréhension du Sola Scriptura sans vouloir l'imposer comme universelle. Pour moi, proclamer l'autorité souveraine des Écritures en matière de foi revient à nous placer dans une obligation de répondre.
Une obligation de répondre : En tant que croyant, la foi nous place continuellement en tension entre ce que nous vivons et ce que nous croyons ; d'autres ont dit ça mieux que moi - c'est la tension entre le "déjà là" et le "pas encore", ou dite autrement c'est la tension entre "l'ordre de la création" et "l'ordre du salut". Cette tension est obligée puisque nous n'avons pas d'autres mondes que le nôtre pour vivre avec Dieu, la foi ne nous projette pas dans un ailleurs qui serait un "avec Dieu" pour ne plus être un "dans ce monde". Du coup, le Sola Scriptura revient à tenir la tension, à relever le défi d'être et "avec Dieu" et "dans ce monde", à ne pas renoncer à la richesse d'entendre et de dire la bonne nouvelle pour aujourd'hui. En tant que "dans ce monde" nous avons obligation à répondre de la Parole que nous entendons de Dieu, et comme étant avec Dieu il nous faut répondre aux questions de sens que peut poser le monde en renvoyant à cette Parole : voilà notre obligation de répondre.
Pour reprendre les catégories classiques (telles que les développe par ex. André Birmelé dans l'horizon de la grâce, cité dans un article précédent) : Oui l’Écriture est suffisante pour nourrir notre foi, oui l’Écriture est son propre interprète et personne d'autre que l’Éternel ne peut nous dicter son sens, oui l’Écriture est la seule norme de tout discours chrétien - mais si l’Écriture est nourriture, interprète et norme ce n'est pas pour nous faire vivre en dehors du monde. Au contraire, la révélation de la bonne nouvelle transmise par les Écriture vient nous permettre de tenir dans ce monde, avec Dieu.
Aujourd'hui le monde nous interroge : j'ai accompagné un couple de personnes de même sexe en m'en tenant au discours de l'église, en refusant de construire une cérémonie et en expliquant notre démarche. Non sans heurts intérieurs pour moi, dans mon ministère pastoral, comme au sein du conseil presbytéral lorsque nous en avons débattu. Il ne s'agissait plus alors de savoir si on était pour ou contre un sujet synodal mais bien de savoir si notre église accompagnait une telle et une telle dans leurs chemins de vies. Lors d'une rencontre avec elles, j'ai assumé ce "non" et je l'assume encore. ça a été ma réponse, car mon Église ne me donnait pas les moyens de répondre autrement. Cette rencontre avec ce couple a été la dernière, et quand il m'arrive de croiser l'une ou l'autre dans le quartier les regards sont fuyants. C'est ma seule expérience, je n'en suis pas fier ; pas plus que la présidente du conseil presbytéral d'alors. Compte tenu des statistiques (10.000 mariages sur 241.000 en 2014 soit 4, 15 %) on peut penser que si je continue à préparer 6 ou 7 bénédictions par ans et en supposant que chaque couple de même sexe, marié civilement, demande à notre Église une bénédiction de son union (hum...) je n'aurai pas d'autres demandes avant 15 ans !
Aujourd'hui le monde nous interroge ; certains préfèrent dire que la question est mal posée, que nous devons encore réfléchir, que le débat a été biaisé, d'aucuns réclament une démarche conciliaire, et j'en passe... autant de manières de na pas répondre. Affirmer l'autorité souveraine des Écritures nous confronte aujourd'hui à une obligation de répondre. Répondre non pas au nom d'une anthropologie, d'une identité, d'une morale, d'une option politique, mais au nom de l’Écriture et de la bonne nouvelle dont elle témoigne...
"L'essentiel et le fondement de l’Évangile, c'est qu'avant de le prendre comme exemple tu acceptes et reconnaisses le Christ comme un don et un cadeau qui t'est donné par Dieu et qui t'est donné en propre. Ainsi lorsque tu regardes à lui, ou que tu entends dire qu'il fait ou endure quelque chose, tu ne douteras pas que le Christ lui-même est tien par cette action et par cette souffrance, et tu placeras en cela autant de confiance que si c'était toi qui l'avait accompli, et même si tu étais le Christ en personne. Tel est, vois-tu, l’Évangile correctement reconnu, c'est la bonté débordante de Dieu qu'aucun prophète, aucun apôtre, aucun ange n'a jamais pu exprimé entièrement, qu'aucun cœur n'a jamais pu suffisamment admirer et comprendre ; c'est le grand feu de l'amour de Dieu pour nous, voilà ce qui rend le cœur et la conscience joyeux, ce qui les remplit d'assurance et les comble ; voilà ce que veut dire prêcher la foi chrétienne"
Martin Luther,
Brève instruction sur ce qu'on doit chercher dans les évangiles et ce qu'il faut en attendre,
in Oeuvres I, Paris, Gallimard, col. bib. de la Pléiade, p. 1039
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire