jeudi 7 mai 2015

Bénir c'est dire du bien - réponse à Gilles Boucomont

Dans un post récent sur ton blog « au nom de Jésus », mon frère, tu t’amuses à tourner en ridicule l’étymologie du verbe bénir, en renvoyant à l’imaginaire, ou à la création de sens, la signification de « dire du bien ». Ce faisant, c’est toi qui tourne au ridicule et qui t’adonne à l’imaginaire : j’en veux pour preuve ce que dit le dictionnaire Trésor de la langue française – ouvrage que l'on ne peut soupçonner de prendre parti dans le débat d’église actuel : « Du lat. benedicere + datif « dire du bien de qqn » (Plaute, dans TLL s.v., 1867, 30) d'où « louer » (Apulée, ibid., 41) d'où en lat. chrét. « louer Dieu, lui rendre gloire » (Itala, ibid., 43), puis « répandre ses bienfaits sur qqn (en parlant de Dieu) » » Bénir c’est donc d’abord, depuis Plaute, dire du bien de quelqu’un et ce n’est que partant de là que les théologiens ont fait des création de sens : qui est menteur ?  

Je te renvoie cette accusation de mensonge que tu formules, mon frère, d’autant que tu m’opposeras sans doute, dans la droite ligne de ton article, le livre de la Genèse du moins la lecture qu tu en fais. Seulement cette lecture est somme toute très partielle et très dangereuse à vouloir dire « le bien de Dieu ». 

En effet, à lire un peu plus que le chapitre 1 de la genèse, le seul qui dans ce texte biblique, pense que l’homme et la femme soient appelés à dire le bien du point de vue de Dieu, c’est au chap. 3, le serpent : « Non, vous ne mourrez pas, mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront et vous serrez comme des dieux possédant la connaissance du bien (le fameux Tov – de la création)  et du mal ».  Vouloir dire le bien de Dieu ou vouloir le connaître, depuis la fausse parole du serpent de la Genèse, même avec une Bible à la main, c’est la définition du péché. 

Le texte biblique nous prévient : nous n’avons pas à nous prendre pour Dieu ! Même quand nous bénissons en son nom, nous ne sommes pas Lui ! Quand bien même nous soyons créé à l'image de Dieu - la bénédiction est de l'ordre d'une parole pas d'une image... Et même en faisant un peu de théologie à partir de ce chapitre 1 de la Genèse, l’argument de l’imago dei ne tient pas  – l’image du Dieu vivant n’est pas plus comme tu l'écris dans l’humain différencié sexuellement qu'en Christ ; là où il n’y a plus l’homme et la femme et où prévaut le statut d’enfants de Dieu. 

Alors finalement, la conclusion de ton article est bien gentille – dans la droite ligne de la théologie morale catholique avec de belles images et peu de parole - mais pour ma part, je ne pense pas que les unions bénies par l’Église viennent "d’avant l’humain", et iront "après elles" ; je ne pense pas "qu’elles tiennent à la beauté et à la bonté de Dieu" ce n'est écrit nul part dans le texte biblique et... je n’y crois pas.

Au nom des violences faites aux femmes, 
au nom des enfants maltraités, 
au nom des couples où l'un(e) est sous la coupe de l'autre, 
au nom des familles où la parole est impossible – car nous bénissons tout cela et bien plus sans pouvoir le savoir : la beauté et la bonté de Dieu ne nous appartiennent pas ! 

Oui, une fois de plus : mêmes mariés, et même bénis, nous restons tous "de pauvres pécheurs, enclins au mal et incapables par nous-mêmes de faire le bien" disait... un affreux libéral ? Alors je ne pense pas bénir légèrement - ce jugement sentimental est facile mais il n'est fondé sur rien - j'ose croire que la bénédiction nous invite à relever le combat de l’amour et que dans ce combat Dieu est avec nous – que nous soyons hétérosexuels ou homosexuels. Plutôt qu'une connaissance fantasmée du "bien de Dieu", c’est là pour moi la bonne nouvelle de l’évangile et la seule source de la bénédiction : pécheurs nous sommes aimés de Dieu et nous sommes invités à dire du bien - du simple bien - en son nom.

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