samedi 4 juin 2016

Prédication sur 1 Rois 17, 17 à 24 - la résurrection du fils de la veuve de Sarepta

Prédication prononcée ce sabbat 4 juin à l'Eglise Adventiste de Béziers
1 Rois 17, 17 à 24
Voici ce qui arriva après ces événements : le fils de cette femme, la propriétaire de la maison, tomba malade. Sa maladie fut si violente qu’il ne resta plus de souffle en lui.
La femme dit à Elie : « Qu’y a-t-il entre moi et toi, homme de Dieu ? Tu es venu chez moi pour rappeler ma faute et faire mourir mon fils. » Il lui répondit : « Donne-moi ton fils ! » Il le prit des bras de la femme, le porta dans la chambre haute où il logeait, et le coucha sur son lit. Puis il invoqua l’Eternel en disant : « Eternel, mon Dieu, veux-tu du mal même à cette veuve chez qui je suis venu en émigré, au point que tu fasses mourir son fils ? »
Elie s’étendit trois fois sur l’enfant et invoqua l’Eternel en disant : « Eternel, mon Dieu, que le souffle de cet enfant revienne en lui ! »
L’Eternel entendit la voix d’Elie, et le souffle de l’enfant revint en lui, il fut vivant.
Elie prit l’enfant, le descendit de la chambre haute dans la maison, et le donna à sa mère ; Elie dit : « Regarde ! Ton fils est vivant. » La femme dit à Elie : « Oui, maintenant, je sais que tu es un homme de Dieu, et que la parole de l’Eternel est vraiment dans ta bouche. »

Un récit de résurrection pour ce matin. Quand, Chrétiens, nous parlons de résurrection la première qui vient à nos esprits comme une évidence, c’est celle de Jésus. Quand on réfléchi, un peu plus, on pense aussi, également à Lazare, dans l’évangile selon Jean. Ou plus proche du texte entendu encore, on peut penser à la résurrection du fils de la veuve à Naïm, rapportée dans l'évangile selon Luc (chap. 7). Si je cite ces textes, c'est qu'il faut dire qu’il n’y a pas tant que ça de récits de résurrection dans les écritures. On peut aussi penser dans le nouveau testament à Eutyque, ce jeune homme qui s’endort en écoutant une prédication de l’apôtre Paul assis sur le bord de la fenêtre de la chambre haute, et qui tombe de trois étages. Dans le premier testament les récits sont encore moins nombreux. Élie est un des rares prophètes a etre acteur de résurrection, Elisée le sera après lui comme c'est rapporté au chap. 4 et au chap. 13 du deuxième livre des rois. 
Bref il n’y a pas tant que ça de récits de résurrection et pourtant chaque récit de mort ressuscité vient dire quelque chose qui lui est propre ; la résurrection prend avec chaque texte un sens particulier, une coloration particulière. Ainsi, de manière centrale, la résurrection du Christ est au fondement de notre foi – le Seigneur est vivant. La résurrection de Lazare, elle vient dire que l’amitié du Seigneur est plus forte  que la mort. A Naïn la résurrection est une force de consolation. Je pourrai reprendre chacun des textes déjà cités. 
Chaque texte, chaque résurrection, vient donner un enseignement particulier sur un sens possible de la résurrection. Aussi je voudrais nous inviter à nous arrêter, ce matin, sur ce texte, peut-être un peu moins connu du premier livre des Rois. Ce texte dans lequel le prophète Élie ressuscite le fils d'une veuve de Sarepta. Car je crois que ce texte vient dire quelque chose de fondamental pour la prédication chrétienne, pour l’annonce de l’évangile aujourd’hui.
Aussi pour bien entendre ce texte, il faut me semble-t-il dans un premier temps le remettre dans son contexte, ensuite entendre ce qu’il veut nous dire sur la résurrection mais pas seulement, et enfin, dans un troisième temps le recevoir pour nourrir notre témoignage à l’évangile, à la bonne nouvelle.


1- Je commence donc par la mise en contexte de ce texte. Nous sommes avec le chapitre 17 du premier livre des rois, sur la première apparition du prophète Elie. Au v. 1 du chapitre 17 c’est même la première fois que le nom d’Elie le Tishbite apparaît – il est présenté comme habitant de Galaad – ce nom désigne en même temps  une région et une ville les deux étant située au nord-est de Jérusalem par-delà le Jourdain. 
Galaad est un point de départ pour suivre Elie qui parcourt le pays. Et le texte du livre des rois résume ses voyages souvent en une formule lapidaire qui ne nous permet pas de réaliser le périple que fait Elie. Ainsi au v. 1 il est en Samarie puisqu’il parle au roi Achab, au v. 3 il part au ravin de Kerith qui est à l’Est du Jourdain puis au v. 8 il est envoyé a Sarepta qui est une ville de la côte méditérannéenne au nord du lac de génnéraseth – bref en 8 versets le prophète a fait au minimum de 200 km, faut-il le rappeler à pied ou au mieux à dos d’ane. 
Quand donc au v. 9 du chapitre 17 il est dit qu’Elie va habiter à Sarepta on peut entendre sans doute un peu de soulagement de pouvoir faire une pause un peu conséquente après ces périples. Intervient alors, à Sarepta la rencontre avec la veuve et son fils. Une veuve qui n’a que très peu et qui le reçoit dans son dénuement, avec un peu de farine et un peu d’huile. Mais avec ce peu, et avec la parole de l’Eternel, cela suffit : cruche de farine ne se videra, jarre d’huile ne désemplira – la veuve, le fils, et l’hôte qui s’est invité ont de quoi manger, ils ont tous de quoi vivre. 


2- C’est alors que survient le drame – et nous arrivons au texte que j’ai lu. J'en arrive à mon deuxième point. Le texte lu qui est marqué par la brutalité de l'événement : La mort du fils. Cette mort est l’issue d’une violente maladie dit le texte biblique. Le souffle de vie n’est plus dans le jeune homme. De fait la mère dit à Elie : « tu es venu chez moi pour rappeler ma faute et faire mourir mon fils ». Elle comprend la mort de son fils comme la conséquence d’une parole du prophète, une parole qui accuse, une parole qui rappelle la faute, une parole qui fait mourir. 
La mort du fils est rappelons le aussi une mise à mort de la mère. Encore aujourd’hui on le sait, une mère ne se remet jamais de la mort d’un de ses enfants, c’est une blessure vive, terrible. Mais à cette douleur qui existe quelque soit les siècles, il faut ajouter que, socialement, une femme mille ans avant la naissance du Christ n’existe que par les hommes. Cette femme déjà était veuve, la seule chose qui pouvait lui donner une existence sociale, économique, citoyenne, etc. c’était son fils, et celui-ci meurt. 
Son passé est le deuil, son présent  est le deuil, et il n’y a plus d’espérance. En plus de la douleur de la perte d’un enfant, cette femme n’est plus rien, socialement, économiquement, civilement sa vie n’a plus de sens. 
Oui la mort du fils est aussi une mise à mort de la mère. Aussi, quand la veuve dit à Elie « tu es venu chez moi pour me rappeler ma faute et faire mourir mon fils » elle porte contre lui une terrible accusation d’avoir employé une parole qui fait mourir, qui la fait mourir, qui a fait mourir son fils.
Entendant cette parole, Elie prend le fils et il s’adresse à Dieu – il prie. Il prie et dans sa prière il met Dieu en cause de la mort du fils : « Eternel, mon Dieu, veux-tu du mal même à cette veuve chez qui je suis venu en émigré, au point que tu fasses mourir son fils ? ». Notons le ce n’est pas la veuve qui accuse Dieu de la mort de l’enfant – elle accuse Elie, et Elie renvoie l’accusation à Dieu. 
Il y a là toute une chaine de culpabilité – soulignons là. La veuve accuse Elie de lui rappeler sa faute – c’est-à-dire qu’elle accuse Elie de l’accuser elle – et c’est pour elle la cause de la mort de l’enfant. Du coup, Elie qui est accusé, dans la prière accuse Dieu à son tour d’être responsable de la mort de l’enfant. C’est alors qu’intervient le miracle – Elie s’étend sur l’enfant trois fois – en répétant la même formule : « Eternel, mon Dieu, que le souffle de cet enfant revienne en lui ! ». Et le souffle revient, et l’enfant revient à la vie. 
Alors Elie rend son fils à sa mère et celle-ci déclare : « Maintenant je sais que tu es un homme de Dieu, et que la parole de l’Eternel est vraiment dans ta bouche » une formule que l’on peut aussi traduire en disant « que la parole de l’Eternel dans ta bouche est vérité ». C’est très fort ! Le miracle, la résurrection, vient ici casser la chaine de culpabilité, l’enchainement des accusations. Le retour à la vie de l’enfant fait passer la veuve d’une parole d’accusation à une parole de vérité. 
Dans ce texte, la résurrection permet à la femme de passer de sa première parole : « Tu es venu chez moi pour rappeler ma faute et faire mourir mon fils » à sa dernière parole : « Maintenant je sais que tu es un homme de Dieu, et que la parole de l’Eternel dans ta bouche est vérité ». 
La résurrection du fils est le miracle d’un retour du souffle dans le corps du jeune homme qui passe de la mort à la vie, mais c’est aussi le miracle pour la veuve d’une parole qui passe de l’accusation, une parole sans Dieu, à une parole de vérité qui s’enracine en Dieu. Il y a dans ce texte non seulement une résurrection mais aussi une conversion. Oui je crois que dans ce texte la veuve de Sarepta, devant la souffle redonné à son fils, devient une femme de foi. 
Pour entendre cela je crois qu’on peut souligner un détail du texte. Au début du  chap. 17 quand la veuve parle à Elie, au v. 12 par exemple elle dit « par la vie du Seigneur ton Dieu je n’ai rien de prêt », et au v. 24 elle dit que la parole du Seigneur dans ta bouche est vérité – elle ne dit plus du Seigneur ton Dieu, c’est comme si la résurrection du fils lui avait permis de s’approprier Dieu. Comme si dans le tragique de l'événement et dans le miracle de la résurrection : le Dieu du prophète est devenu le sien. 

3- Un récit de résurrection pour ce matin. Je le disais en commençant, chaque texte biblique vient donner un enseignement particulier sur un sens possible de la résurrection. Aussi je crois que ce texte vient dire quelque chose de fondamental pour la prédication chrétienne, pour l’annonce de l’évangile aujourd’hui. Ce trait fondamental est dans la parole, dans le passage de parole, dans le changement de parole de la mère. Une parole qui est dynamique, mise en mouvement ; une parole qui passe de l'accusation a la vérité ; une parole qui passe de la culpabilité qui rappelle la faute, a une parole qui donne la vie en Dieu. Ce changement de parole je crois, nous avons tous à l'entendre, tous à le vivre. 
« Tous » en tant que croyant, « tous » en tant qu'église aussi. Car avant d'entendre l'évangile, avant d'entendre la bonne nouvelle, nous sommes tous des experts comptables de la culpabilité – pour celles et ceux qui sont torturés il y a la comptabilité de nos propres fautes ; pour celles et ceux qui se pensent au-dessus de la mêlée, un peu meilleur que les autres, il y a la comptabilité des fautes des autres. Et il y a ceux qui cumulent, les experts comptables en faute personnelles et celles des autres. Mais que ce soit nos propres fautes, ou celles des autres, nous en sommes tous des experts comptables. Mais cette comptabilité de culpabilité, elle ne peut conduire qu'à la mort. 
Et dans le texte c'est très fort, alors même que par la parole du prophète, Dieu donne la vie, en faisant en sorte qu'ils aient à manger au moment de la famine – le fils meurt et la femme comprend ça comme la conséquence de ses fautes. Même devant un Dieu qui la nourrit miraculeusement pour lui donner à vivre, la veuve croit que la mort est le châtiment de sa faute. Il faut qu'elle sorte de là pour entendre que Dieu veut la vie, et qu'il veut la vie en vérité. Ça semble être une évidence, l'Eternel n'a pas fait en sorte que cette famille soit nourrie pour que ce fils meurt. Là n'est pas le projet de Dieu. Et pourtant ce n'est pas évident à entendre. 
Du coup ça veut dire que le projet de Dieu n'est pas dans la comptabilité des fautes des uns ou des autres, ou de ses propres fautes. Le projet de Dieu est de nous sortir de la culpabilité pour nous donner à vivre, à vivre en abondance. Nous sortir de la culpabilité, nous entrainer avec lui, nous déplacer. On peut alors se souvenir, qu'il n'est pas anodin que le prophète ait parcouru 200 km a pied en quelques versets, la parole est une parole de changement, de déplacement.
La résurrection est toujours une parole de vie sur la mort. Une parole que nous avons tous à entendre – dans notre relation à Dieu. Car par la résurrection du Christ, nous touchons là à quelque chose de fondamental. La résurrection n'est pas un détail de l'histoire ou une option à une confession de foi. Oui il nous faut entendre la parole de la résurrection. 
Cela veut dire qu'en Église nous avons aussi besoin d'entendre que nos relations n'ont pas à être de l'ordre de la culpabilité et de l'accusation, mais de donner du souffles aux frères et aux s?urs, donner du souffle, rendre souffle à ceux qui semblent ne plus en avoir. C'est vrai dans nos églises et c'est vrai entre nos églises. Nous avons a être les uns pour les autres des hommes et des femmes de Dieu, des êtres de chair et de sang, des êtres mortels, qui sommes capables de redonner souffle, de ressusciter, de donner à vivre. Faire sortir de la culpabilité qui enferme pour ouvrir à la liberté des enfants de Dieu. Faire sortir d'une logique d'expert comptable de la faute pour donner à être dans la joie des filles et fils du père, donner à entrer dans le dynamisme de Dieu, se mettre en marche avec Dieu. 
Etre en église témoin de résurrection, être entre nos églises, témoins ensemble de résurrection. Je crois que notre monde en a besoin, et quand je dis notre monde, il commence ici notre monde, avec nous : nous en avons besoin. Nous en avons besoin quand nos vies ne semblent plus être que des chiffres, quand l'horizon semble bouché, quand le manque d'espérance en l'avenir fait ressurgir les démons politiques du passé. 
Oui notre monde commence ici dans chacune de nos vies – chaque fois que la peur, la culpabilité, la faute, la mort semble l'emporter ; il faut se souvenir que le Christ est ressuscité, que là est le fondement de notre foi, que le Christ est vainqueur. Ça veut dire très certainement que la peur doit laisser place à la joie, que la culpabilité s'efface dans le pardon de Dieu, que la faute n'est rien comparé à l'amour, et que la mort est derrière nous car nous sommes vivants d'une vie éternelle en Dieu. Entrer dans le dynamisme du Dieu vivant. Dans la joie, le pardon, l'amour et la vie se trace l'espérance du monde, se trace le royaume du père qui nous est promis et donné à vivre dès ici bas. 
Un récit de résurrection pour ce matin – une parole dynamique, qui nous invite à passer de la mort à la vie. Le prophète Élie ressuscite le fils d'une veuve a Sarepta. C'est un événement d'il y a 3000 ans. Mais la parole de cette résurrection est encore pour nous aujourd'hui, une parole a vivre pour en témoigner. Notre Dieu n'est pas le comptable de nos fautes, il est le souffle qui nous met au large et nous donne à vivre sous l'horizon de sa grâce. 

Au Christ seul soit la gloire. Amen

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