dimanche 4 septembre 2016

Prédication du dimanche 4 septembre - Evangile selon Marc, chap. 4, 21-34

 Evangile selon Marc, chap. 4, v. 21 à 34 :

 21Il leur disait : « Est-ce que la lampe arrive pour être mise sous le boisseau ou sous le lit ? n’est-ce pas pour être mise sur son support ? 22Car il n’y a rien de secret qui ne doive être mis au jour, et rien n’a été caché qui ne doive venir au grand jour. 23Si quelqu’un a des oreilles pour entendre, qu’il entende ! »

24Il leur disait : « Faites attention à ce que vous entendez. C’est la mesure dont vous vous servez qui servira de mesure pour vous, et il vous sera donné plus encore. 25Car à celui qui a, il sera donné ; et à celui qui n’a pas, même ce qu’il a lui sera retiré. »
 26Il disait : « Il en est du Royaume de Dieu comme d’un homme qui jette la semence en terre : 27qu’il dorme ou qu’il soit debout, la nuit et le jour, la semence germe et grandit, il ne sait comment. 28D’elle-même la terre produit d’abord l’herbe, puis l’épi, enfin du blé plein l’épi. 29Et dès que le blé est mûr, on y met la faucille, car c’est le temps de la moisson. » 
 30Il disait : « A quoi allons-nous comparer le Royaume de Dieu, ou par quelle parabole allons-nous le représenter ? 31C’est comme une graine de moutarde : quand on la sème en terre, elle est la plus petite de toutes les semences du monde ; 32mais quand on l’a semée, elle monte et devient plus grande que toutes les plantes potagères, et elle pousse de grandes branches, si bien que les oiseaux du ciel peuvent faire leurs nids à son ombre. »
 33Par de nombreuses paraboles de ce genre, il leur annonçait la Parole, dans la mesure où ils étaient capables de l’entendre. 34Il ne leur parlait pas sans parabole, mais, en particulier, il expliquait tout à ses disciples.

Des paraboles de graines, encore pour aujourd'hui. Des paraboles de graines après la parabole du semeur la semaine dernière – parabole que le groupe de chant nous a rappelé par son chant d'entrée. La graine image d'espérance dans le mouvement de la vie. En fait à bien entendre ce que dit Jésus et ce qu'il répète – c'est que cette espérance à, pour lui, un nom : il s'agit du royaume. La graine c'est le royaume, les paraboles de la graine sont des paraboles du royaume... quand on dit ça, ce n'est pas forcément évident à entendre.

Ce n'est pas forcément évident à entendre car quand on parle du royaume – souvent très inconsciemment pour nous chrétiens c'est quelque chose d'assez noble, d'assez classe, voire, pour utiliser une expression à la mode, le royaume a quelque chose de très bling-bling. Le royaume c'est, comme nous l'avions entendu l'année dernière en étude biblique, c'est la Jérusalem céleste qui descend d'auprès de Dieu – avec une liste longue comme le bras de pierres précieuses, d'or et de cristal. Ça c'est classe oui ! Le royaume c'est quelque chose de glorieux, de lumineux, de pimpant !

Dans un autre style, on peut aussi penser aux représentations du Christ roi – représentation classique d'un Christ tout en sérénité. Dans l'iconographie classique c'est un Christ triomphant assis sur un trône de lumière, et qui rayonne de gloire.

Ces icônes et autres représentations du Christ-roi glorieux, les images apocalyptiques de la Jérusalem céleste sont donc assez éloignées d'un homme, d'un paysan, les deux pieds dans la terre, le pagne relevé, et qui lance ses graines... Il y a entre les représentation classique et classieuses du royaume et la graine, comme un hiatus, un fossé, comme une contradiction

Or ne nous méprenons pas sur ce que dit Jésus : « Il en est du royaume comme d'un homme qui jette la semence en la terre », la chose est claire et pour qu'on ne puisse pas penser qu'il a laissé son esprit vagabonder quelques instants, Jésus se répète : « a quoi allons-nous comparer le Royaume de Dieu, ou par quelle parabole allons-nous le représenter ? C'est comme une graine de moutarde ». Le royaume est bien comme un paysan au travail, comme une graine, toute petite, graine de moutarde.

L'image du semeur, l'image de la graine, est une image d'espérance dans le mouvement même de la vie, cette image est parabole du royaume, pour Jésus. Nous ne sommes ni avec un Christ serein et triomphant, ni avec la Jérusalem céleste, mais nous sommes dans un contexte agricole avec une image simple et humble – on se souviendra que humble, vient de humus, cette couche de terre en surface qui donne la vie, qui porte la vie

La graine comme parabole du royaume – une graine qui pousse toute seule, qui comporte en elle toute l'énergie nécessaire à la vie ; le semeur : qu'il dorme ou qu'il soit debout dit Jésus, peu importe : la semence germe et grandit. Un graine qui pousse toute seule, et une graine qui, dans son élan de vie, inverse toutes les proportions : la plus petite des graines – la graine de moutarde – contient la plus grande des plantes potagères.

Ces images, ces paraboles, pour Marc sont des annonces de la Parole – à travers ces images c'est donc l'essentiel de l'évangile que Jésus tente de transmettre. Cet essentiel qui semble rester incompréhensible aux disciples, ou peut-être inacceptable. Cet essentiel est l'évangile : Dieu se fait connaître sous la forme de son contraire – sub contraria specie – sous la forme de son contraire. Comme le royaume est un paysan qui travaille, Dieu est un homme qui parle au cœur des hommes dans le quotidien et le banal d'une vie simple. Comme la graine – sèche et morte – est porteuse d'un trop plein de vie, Dieu est force de naissance et de renaissance, jaillissement de vie.

Dieu se fait connaître sous son contraire. Pour les disciples il y a quelque chose là d'incompréhensible, d'inacceptable. La différence entre nous et les disciples, c'est que nous, nous connaissons la fin de l'histoire – nous savons que le Christ est mort et qu'il est ressuscité. Cet événement de la mort et de la résurrection du fils de Dieu sont bonne nouvelle.

Jésus introduisait ces paraboles de la graine qui pousse toute seule et de la graine de moutarde avec une sentence elle-même ambigüe : « il n'est rien de caché qui ne doive se manifester, rien de secret qui ne doive venir en pleine lumière. Si quelqu'un a des oreilles pour entendre, qu'il entende ! ». La manifestation de la Parole qui a lieu à travers les paraboles ne recevra sa pleine révélation que plus tard, qu'au moment fatidique de la crucifixion et de la résurrection.

Alors, quand tout est accompli, à ce moment là de l'évangile, nous pourrons entendre la force de vie donnée, l'élan pour notre espérance non plus dans l'image d'une graine qui pousse, mais dans la Parole de vie qui traverse la mort et qui réduit à néant son caractère inexorable et définitif.

Les disciples eux n'ont pas la fin de l'histoire, ils ne connaissent pas encore la puissance de Dieu à l’œuvre dans l'homme de Nazareth, ils suivent un prédicateur, qui fait des miracles, et dont la parole ne peut qu'intriguer : son royaume est semblable à un paysan qui sème, son royaume est comme une graine de moutarde. Forcément il faut des oreilles pour entendre, des oreilles qui ont entendu déjà la fin de l'histoire, cette fin de l'histoire qui dit que Dieu est là dans cet homme aux histoires de graines.

Avec Jésus, avec cet homme aux paraboles oui, Dieu se fait connaître sous forme de son contraire. En fait Jésus traduit Dieu dans notre humanité, pourrait on dire. La parabole peut toujours être assimilé à un geste de traduction – trouver la bonne image, le bon langage, la bonne référence. Exercice de traduction – l'évangile, lui même est une traduction, ainsi le pasteur Charles Wagner écrivait ainsi :

« Ce qu’il y a de meilleur en Dieu, c’est l’homme. Un Dieu qui ne se traduirait pas en humanité n’existerait pas pour nous. C’est l’être en soi, trop haut ou trop loin, trop chaud ou trop froid. Il faut qu’il se mette à niveau et à notre température, et pourtant qu’il nous dépasse de toute la hauteur de l’infini. Voilà le mystère rapproché de notre horizon par la révélation de Jésus » (L'homme est une espérance de Dieu, p. 37)

La révélation de Jésus rapproche Dieu, elle traduit Dieu, elle dit la proximité de Dieu avec nous. Ainsi le même Charles Wagner disait à Dieu, dans une de ses prières : « Tu n’es pas un Dieu lointain, mais prochain ; tu nous sondes et nous environnes. Tu veux combattre marcher, souffrir et pleurer avec nous. Si nous tombons, tu te baisses vers nous ; nos fardeaux sont tes fardeaux ; notre cause, ta cause… » (L'homme est une espérance de Dieu, p. 140)

Traduire Dieu à la surface du sol – je le disais tout à l'heure, là est la couche d'humus – cette couche de feuilles et de matériaux décomposé ; tout ce qui semble mort et qui pourtant donne la vie. Traduire Dieu à la surface du sol, c'est réalisé que nous ne sommes jamais plus haut cette couche là, à la surface – réaliser que l'humilité est notre condition car Dieu lui même l'a choisi pour lui. A la surface du sol, dans l'humilité, à la couche d'humus se donne le potentiel de la vie pour chacun d'entre nous.

Traduire Dieu à la surface du sol, dire Dieu sous la forme de son contraire – l'humilité est notre condition ; il ne s'agit pas de vouloir paraître humble, ou de faire de l'humilité un exercice sentimental ou moral. Mais il s'agit de prendre en considération que notre dimension d'humain, notre dimension de femme et d'homme est toujours une dimension au raz des pâquerettes, au raz de l'humus ; et pourtant là, sans triomphalisme ni gloriole, là se dessine déjà le royaume du Père, là peut se vivre une espérance, là peut se partager l'évangile.

Deux paraboles de graine pour dire le royaume – une graine qui pousse toute seule et une graine qui, dans son élan de vie, inverse toutes les proportions : la plus petite des graines – la graine de moutarde – contient la plus grande des plantes potagères. Deux paraboles pour aujourd'hui alors que les églises chrétiennes ont entamé poru un mois un temps pour la création. En effet, du 1er septembre au 4 octobre nos églises sont appelées à être attentives et actives, vigilantes et interpellantes sur le respect de la création, l'environnement. L'humilité s'est aussi se rappeler que nous n'avons pas d'autre monde que celui-ci pour vivre et pour espérer, pour aimer et pour bâtir l'église de Christ en vue de son royaume.

Je vous invite à la prière :

Nous venons à Toi,Dieu de l'infiniment grand,Dieu de l'infiniment petit,
des galaxies et des atomes,
si lointain par la liberté que tu as donnée à l'humain,
si proche par l'amour et la foi dont tu nourris son coeur.
Nous te bénissons pour l'intelligence et la créativité des hommes.
Sans elles, toute bataille serait perdue d'avance, tout défi abandonné,
et l'on ne saurait prendre soin des biens que tu nous as confiés.
Mais garde-nous aussi de la tentation
des apprentis-sorciers,
plus conscients de leur pouvoir que de leur devoir,
mettant toute leur assurance dans leur science.
Garde-nous de la tentation de puissance,
qui hypothèque l'avenir de tes créatures,
sème le danger et la peur.
Et montre-nous la voie du monde de demain,
où la création vivra pleinement
la réconciliation que Jésus, le Christ,
lui a déjà donnée. Amen !

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